Le deuil à la rue

Vivre dans l’univers de la grande exclusion amène souvent les bénévoles et les salariés à être confrontés à la question de la mort. L’espérance de vie à la rue est de 27 à 30 ans de moins qu’une personne socialement insérée. Cela ramène chacun à la question du sens de l’existence.

 

Accompagner dans le deuil

« La question de la mort trouve toujours une réponse dans la vie ».

 

Témoignage d’Audrey, responsable d’antenne

Le deuil à la rue ©Géraud Bosman« Nous n’avons plus de nouvelles de Roger »… « Apparemment Martha a été hospitalisée la semaine dernière ». Ces phrases sont souvent dites ou entendues par les personnes de la rue ou les équipes des Captifs. Et malheureusement, parfois, ces phrases peuvent être suivies par l’annonce du décès de la personne.

Lorsqu’on se place auprès des personnes de la rue dans leur parcours de vie, il arrive, quelquefois, mais toujours trop souvent, qu’on soit également témoin de leur décès. Si les démarches et l’organisation des obsèques sont gérées par des travailleurs sociaux ou notre partenaire, le Collectif Les Morts de la Rue, comment ce décès est-il vécu par les personnes sans abris ? Comment vivent-elles sa disparition brutale ?

Le deuil se porte par les souvenirs que l’on a de la personne décédée, les objets qu’elle laisse, les esprits qu’elle a touchés, l’héritage qu’elle a transmis. Mais les souvenirs pour les personnes de la rue peuvent être décousus et incomplets. Ils peuvent ne concerner qu’une partie de la vie de son compagnon de galère. A la rue, les passants, les services de nettoyage, les autres personnes en errance ramassent, trient, jettent et effacent les traces du passage et de la vie à la rue. Le deuil alors se porte dans le cœur, en prière à l’occasion des prières-rue des Captifs, en allant se recueillir de temps en temps dans la chapelle des Morts de la Rue de l’Eglise Saint Leu où les noms des personnes décédées à la rue sont encadrés et accrochés.

Mais le décès d’un ami peut également amener d’autres questionnements : « Je ne veux pas mourir comme ça » nous dit l’un. « Il n’avait plus de lien avec sa famille. Il est mort seul. Il est peut-être temps que je recontacte mes enfants » nous dit un autre.

Une faille apparaît alors dans le rempart de certaines personnes. La question de la mort trouve toujours une réponse dans la vie. Et c’est cette graine de réponse que les équipes salariées et bénévoles des Captifs essaient de faire germer avec les personnes qu’elles rencontrent dans la rue et accompagnent.

 

Audrey Pleynet, responsable de l’antenne Paris Centre (Saint Leu-Saint Gilles)

 

Télécharger le rapport 2014 du Collectif Les Morts de la Rue

 

Pour en savoir plus sur la vie spirituelle au sein de l’association Aux captifs, la libération :