Témoignage de Jean, bénévole

Jean est bénévole au sein de l’association depuis 13 ans.

Voici son témoignage, lu lors de la veillée de prière du 10 mars 2016 à l’église Saint Leu-Saint Gilles

 

Ce témoignage, après 3 ans comme bénévole au Samu social de Paris, et maintenant depuis 13 ans aux captifs, je vous le livre comme une action de grâce pour tout ce que j’ai vécu et reçu pendant ce cheminement auprès et avec nos frères de la rue dans le cadre de cette belle association « Aux captifs, la libération ».

Un grand merci à tous : mes frères de la rue,  et les cadres, les salariés, les stagiaires, les bénévoles de l’association et tous les binômes qui m’ont accompagnés. Ma foi chrétienne, je l’ai toujours voulue incarnée comme le Christ qui a pris ce risque. C’est suite à mon retour professionnel sur Paris et suite à l’appel de Jean Paul II pour le jubilé de l’an 2000 : un appel à plus d’humanité, de fraternité pour ce nouveau millénaire, que j’ai pris cet engagement comme bénévole étant interpellé par tant de « SDF » comme l’on dit pudiquement et que je ne voyais pas en province.

 Maraude auprès de SDF ©Géraud BosmanMais comment dire et vous expliquer l’inexprimable de tous les changements intérieurs qui petit à petit, jour après jour sont intervenus dans mon cœur depuis. Comment exprimer ces liens intangibles, discrets et fragiles, très pudiques et personnels qui se sont créés avec le temps des rencontres et des partages réguliers dans ce « chez vous » quand  nous sommes accueillis avec délicatesse pour nous asseoir pour dialoguer moi et mon binôme.

Tous ces contacts ont fait de moi un être toujours plus ouvert, plus fraternel, à l’écoute sans aucun jugement et plein de miséricorde, car j’ai été confronté de ce fait à mes propres faiblesses, mensonges et petites bassesses, à des soucis familiaux parfois identiques et qui m’ont fait prendre encore plus conscience du regard de Dieu sur moi en me pardonnant sans cesse et me permettant toujours de me relever et d’avancer sans cesse. 

Un exemple pour symboliser cette grâce qui se reçoit, se partage dans ce lien qui  se créé et qui se perpétue dans le temps : Je l’appellerai « Paul » : la rue depuis pas mal d’années : alcool, drogue. Au début de nos rencontres, il me disait : « C’est un choix, la société est pourrie ». Avec le temps l’amitié se forge, se teste, s’éprouve : jusqu’à parfois me demander de lui garder ses affaires pendant qu’il va faire ses courses, ce fut une vraie expérience : expérimenter et vivre le regard des autres : devenir invisible : le pire peut-être, regards indifférents, regards de dédain, etc.…..Et quand il revient : « T’as pas fait une pièce, je ne suis pas près de t’embaucher » lâche-t-il d’un air goguenard.

 

« Tous ces contacts ont fait de moi un être toujours plus ouvert, plus fraternel, à l’écoute sans aucun jugement et plein de miséricorde, car j’ai été confronté de ce fait à mes propres faiblesses ».

 

Puis un jour, il nous demande de façon dense et profonde que la rue, il en peut plus, il veut en sortir et savoir si on peut l’accompagner pour une cure. On en parle de façon claire en lien avec l’association, on s’organise: on le suit et l’accompagne dans tout ce cheminement. Aujourd’hui, toujours abstinent, avec un logement et une amie, des liens reconstruits avec toute sa famille, un stage en vue pour un job après bilan de compétences… Une réelle amitié malgré la distance nous unit, de temps en temps une pensée, une info ou une réflexion qu’il me partage et qui m’engage encore plus dans ma foi, cette foi qu’il me demande de partager. 

 

Veillée de prière ©Géraud BosmanUn jour il m’envoie un sms: « Je viens de lire : Quoique que ce soit que nous demandions selon sa volonté, il nous entend » –  je demeure  encore sceptique, mais il y a des signes». Je lui réponds et il me renvoie un autre message : « Merci pour ta sagesse, ça me rassure, mais plus je vieillis, plus je m’approche de Lui, mais je laisse faire les choses car c’est dur de se dire qu’il y a un Tout-Puissant car s’il est il voit tout et j’n’ai pas fait que des bonnes choses ».  Je le remercie pour sa réponse lucide et le rassure sur le regard que Dieu porte sur chacun de nous, qu’Il nous pardonne tout et que pour Lui ne sont importantes que les pages blanches à écrire du livre de nos vies. Et je termine  mon témoignage sur son dernier sms en réponse, ….que je  dédie  à tous ceux qui sont engagés  dans l’association : « Merci d’avoir été là…. merci d’être là  et  de devenir   « Avenir », continuez et vous serez  encore ». 

 

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