Bien plus qu’un travail

Anne-Isabelle est salariée de l’association depuis 5 ans. Plus qu’un travail, une mission où la miséricorde est à l’oeuvre. Voici son témoignage, lu lors de la veillée de prière du 10 mars 2016 à l’église Saint Leu-Saint Gilles

 

« Depuis 5 ans que je suis aux Captifs, La Miséricorde je la vois à l’œuvre, elle agit ! elle est là ! voilà comment je la vis : C’est d’abord dans la tendresse , dans le regard de tendresse que nous portons sur tous ceux que nous rencontrons, témoin de cette tendresse de Dieu pour chacun de nous, une tendresse qui va jusqu’au bout !

Je me souviens de Sylvie, qui avait un dossier de 10cm d’épaisseur, elle était accompagnée depuis 15 ans par les Captifs, avec des hauts et des bas ! des sacrés coups de gueule ! une fois elle avait même balancé une brique dans la vitre de notre bureau ! Mais Sylvie a été très malade, et malgré tout nous avons été là, à ses côtés durant la maladie, et jusqu’au bout. Je me souviendrais toujours la veille de son départ pour l’Au-delà, nous étions là, autour d’elle, avec toute l’équipe, je me souviens lui dire à quel point nous l’aimions, qu’elle pouvait partir en paix… 

Cheval52C’est un regard de tendresse qui ne doit jamais perdre espoir ! Même si ce n’est pas tous les jours faciles, et qu’on a envie de baisser les bras pour eux….Non ! On doit continuer à avoir ce regard d’espoir, comme le regard que Dieu porte sur chacun de nous ! mais en même temps qui respecte le temps de chacun, qui laisse « libre » comme disait Julien juste avant.  

–          Je pense encore à Maquéro que j’ai accompagnée au cimetière de Thiais lundi dernier…décédée dans l’anonymat, nous ne connaissons toujours pas son nom ! Combien d’années est-elle restée sur cette plaque chauffante en face de gare du nord ? ….mais nous avons continué à la rencontrer, nous avions toujours espoir… c’est notre devoir de garder Espoir ! Combien avancent, chutent, rechutent, combien de Pascal, de Laurent, de Thierry nous accompagnons qui ont des parcours longs et difficiles…

Je me souviens de Simon rencontré pendant 5 ans par des bénévoles sur un banc…qui un jour, s’est « remis en marche », un mystère ! Mais c’est lui qui a foncé tout droit ! Nous étions là alors à l’accompagner, à le soutenir, à marcher à ses côtés…on ne les laissent pas seuls, c’est dur de se remettre seul en route… aux dernières nouvelles il donnait à présent des cours de soutien à un enfant !

Je suis témoin de ces miracles, de ces remises en routes mystérieuses…Stéphane qui retrouve du Travail, Yannick, Miloud qui retrouve un toit, etc. Et puis j’aime aussi cette image du « médecin » pour parler de la miséricorde aux Captifs. Le médecin appuie sur la plaie pour la désinfecter, ça fait mal, on grince des dents, on pleure parfois…mais c’est le prix à payer pour laisser soigner notre plaie.

Je trouve que le Seigneur agit de la même manière aux Captifs. Nous recevons beaucoup des cris des personnes, des cris de colères contre l’injustice de leur situation, contre ce qu’ils ont soufferts de la vie, contre ce que les hommes leurs ont fait, des larmes parfois…ce n’est pas facile pour nous de recevoir tout ça…mais c’est important de les écouter…ça me fait penser à cette image de Marie debout, silencieuse, au pied de la Croix de son fils. Certains n’ont même plus la force de crier, nous devons les aider à faire rejaillir leur voix, leur vie….c’est par là, par ces cris, qu’ils arrivent à ouvrir peu à peu leur cœur et qu’ils acceptent peu à peu d’être aidés, et aimés par Dieu, de pardonner et d’être pardonné.

« On doit continuer à avoir ce regard d’espoir, comme le regard que Dieu porte sur chacun de nous ! »

Enfin, la miséricorde je la vois à l’œuvre, mais elle n’est pas à sens unique….je la vois, j’en ai été moi-même la « victime » ! Avant les Captifs je n’avais rien compris à cet amour inconditionnel du Père pour nous , pour moi! J’ai fait une mission humanitaire en Argentine….mais aujourd’hui je voudrais la refaire car j’étais complètement à côté de la plaque, je n’avais rien compris !!! Aujourd’hui, après 5ans passés aux Captifs, je peux témoigner pour moi-même mais aussi pour beaucoup de mes collègues présents ici ce soir…de ce chemin de libération que nous menons tous aux Captifs ! Pas facile d’en parler car c’est de l’ordre de l’intime, du parcours personnel de chacun… mais nous sommes tous Captifs ! Nous aussi nous en venons peu à peu à mettre le doigts sur nos souffrances, nous les crions, les larmes nous sont venus aussi…mais comme pour tous, c’est le prix à payer pour nous laisser aimer ! comprendre à quel point nous sommes aimés inconditionnellement du Père ! Comprendre combien « Nous sommes plus beaux que nous osons le croire » (Jean Vanier)! TOUS !  Et alors, se sont vous, Josian, Joelle, Ali, c’est quand je vous vois là, debouts, courageux dans la vie malgré tout ce que vous avez traversé, à vous relever inlassablement, avec force ! c’est là que moi je puise ma force pour avancer, pour panser mes propres plaies, vous êtes nos maîtres… Je rends grâce au Seigneur tous les jours d’avoir mis les Captifs sur mon chemin, une si belle œuvre de miséricorde ! »

 

 

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